La délégation d’autorité parentale est une mesure juridique permettant à un ou plusieurs parents de transférer tout ou partie de l’exercice de leurs droits et devoirs à l’égard de leur enfant à un tiers, dans certaines situations précises et sous contrôle du juge.

Souvent méconnue du grand public, elle répond à la nécessité de protéger l’intérêt de l’enfant lorsque les parents ne sont plus en mesure d’assumer pleinement leur rôle parental.

Ce mécanisme a connu des évolutions marquantes grâce à des réformes récentes, notamment les lois du 18 mars 2024 et du 19 février 2024, et une jurisprudence abondante qui en précise les contours.

1. Qu’est-ce que la délégation d’autorité parentale ?

La délégation d’autorité parentale consiste à confier à un tiers (membre de la famille, proche digne de confiance, établissement agréé ou service d’aide sociale à l’enfance) tout ou partie de l’exercice des droits et devoirs que la loi attribue aux parents sur leur enfant mineur.

La délégation peut être :

    • Totale : le délégataire prend toutes les décisions importantes et courantes concernant l’enfant (éducation, santé, logement, etc.) ;
    • Partielle : seuls certains aspects (par exemple, la scolarité ou la santé) sont transférés au délégataire.

 2. Qui peut demander une délégation d’autorité parentale ?

    • Délégation volontaire

Les parents titulaires de l’exercice de l’autorité parentale (ensemble ou séparément) peuvent demander au juge aux affaires familiales la délégation d’autorité parentale lorsqu’ils rencontrent des difficultés les empêchant d’assumer leur rôle.

    • Délégation imposée

Dans certains cas, la délégation peut être imposée par le juge, notamment :

      • désintérêt manifeste des parents ;
      • impossibilité pour les parents d’exercer tout ou partie de l’autorité parentale (maladie, incarcération, etc.) ;
      • poursuites ou condamnation d’un parent pour un crime grave.

Par ailleurs, un membre de la famille, la personne ou l’institution qui a recueilli l’enfant, ou le procureur de la République (dans certains cas graves), peuvent aussi saisir le juge pour demander la délégation.

3. Qui peut être désigné délégataire ?

Le ou les délégataires sont choisis par les parents ou par le juge selon les cas. Il peut s’agir :

    • d’un membre de la famille (grand-parent, oncle, tante, etc.) ;
    • d’un proche digne de confiance (par exemple, le compagnon ou la compagne du parent) ;
    • d’un établissement agréé pour le recueil des enfants ;
    • du service de l’aide sociale à l’enfance.

Le juge vérifie systématiquement que le délégataire présente toutes les garanties nécessaires pour le bien de l’enfant et peut refuser la délégation s’il estime que ce n’est pas le cas.

Il ne peut pas imposer un autre délégataire que celui proposé, sauf en cas de délégation imposée.

4. Procédure de délégation d’autorité parentale

La délégation ne peut résulter que d’une décision du juge aux affaires familiales du lieu où demeure le mineur.

Elle se fait sur requête conjointe ou séparée des parents, ou à la demande d’un tiers autorisé.

À l’audience, le juge entend toutes les parties concernées, dont le ministère public, et peut ordonner diverses investigations (enquête sociale, expertise psychologique, etc.) afin de s’assurer que la délégation est conforme à l’intérêt de l’enfant.

5. Les effets de la délégation

    • Délégation totale

Le délégataire exerce tous les attributs de l’autorité parentale à la place des parents, à l’exception du droit de consentir à l’adoption de l’enfant, qui reste toujours attaché aux parents.

Le délégataire peut être amené à prendre des décisions majeures, telles que consentir au mariage ou à l’émancipation du mineur, sous réserve des modalités fixées par le jugement.

    • Délégation partielle ou partage

La délégation peut porter uniquement sur certains droits ou devoirs (par exemple, la santé ou l’éducation), le parent gardant le reste de l’exercice de l’autorité parentale.

Le partage n’est pas un partage « distributif » mais un exercice conjoint, qui nécessite l’accord de tous les titulaires de l’autorité parentale et une décision du juge.

    • Droits et devoirs maintenus pour les parents

Même en cas de délégation, les parents restent tenus à l’obligation d’entretien de l’enfant, à moins que la juridiction n’en décide autrement.

Ils conservent le droit de consentir à l’adoption de leur enfant, ce droit étant insusceptible de délégation.

6. Fin et restitution de la délégation

La délégation n’est jamais définitive. Les parents peuvent demander à retrouver l’exercice de leur autorité parentale si des circonstances nouvelles le justifient, après décision du juge aux affaires familiales.

Si la restitution est accordée, ils pourront être amenés à rembourser tout ou partie des frais engagés par le délégataire pour l’entretien de l’enfant.

7. L’intérêt supérieur de l’enfant au cœur de la décision

Le juge statue toujours en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant, qui constitue la boussole de toute décision en matière d’autorité parentale.

Le juge apprécie notamment :

    • les circonstances concrètes de la famille ;
    • les liens affectifs de l’enfant avec le délégataire ;
    • la volonté et la capacité du délégataire à prendre soin de l’enfant ;
    • la volonté et la capacité des parents à reprendre ou conserver leurs droits.

Conclusion

La délégation d’autorité parentale constitue un outil adapté pour protéger l’intérêt de l’enfant lorsque les parents ne peuvent plus assumer seuls leur mission.

Elle nécessite une décision du juge aux affaires familiales, qui apprécie chaque situation au cas par cas, en veillant toujours à préserver l’équilibre et la stabilité du mineur.

Pour toute question ou projet de délégation, n’hésitez pas à prendre RDV.